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rappeler cette honte, n’en prétendent pas moins ériger en loi le désordre du marché et l’arbitraire mercantile. Ils y voient un principe aussi sacré que celui de la famille et du travail. L’école de Say, vendue au capitalisme anglais et indigène, après les jésuites foyer le plus infect de contre-révolution, semble n’exister depuis dix ans que pour patroner et préconiser l’exécrable industrie des accapareurs de capitaux et de denrées, en épaississant de plus en plus les ténèbres d’une science naturellement ardue et pleine de complications. Ces apôtres du matérialisme étaient faits pour s’entendre avec les éternels bourreaux de la conscience : après les événements de février ils ont signé un pacte avec les jésuites, pacte de famine et pacte d’hypocrisie. Que la réaction qui les soudoie se hâte de leur faire à tous une retraite et qu’ils se cachent vite ; car je les en avertis, si la Révolution épargne les personnes, elle ne pardonnera pas aux œuvres.

Sans doute la Valeur, expression de la liberté, incrément de la personnalité du travailleur, est de toutes les choses humaines celle qui répugne le plus à toute espèce de réglementation. Là est le prétexte de la routine, l’argument de la mauvaise foi économiste. Aussi les disciples de Malthus et de Say, repoussant de toutes leurs forces l’intervention de l’État dans les choses du commerce et de l’industrie, ne manquent-ils pas de se prévaloir, à l’occasion, de ces apparences libérales, et de se prétendre plus révolutionnaires que la révolution. Plus d’un esprit honnête s’y est laissé prendre : on n’a pas vu que cette abstension du Pouvoir en matière économique était la base même du gouvernement. Qu’aurions-nous à faire d’une organisation politique, en effet, si le Pouvoir