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Je n’ai pas besoin, je pense, de montrer par un commentaire que ce projet, complément nécessaire des autres, n’est encore qu’une application en grand de l’idée de contrat ; que l’autorité centrale n’y figure un moment que pour la promulgation de la volonté populaire, que je suppose déjà exprimée dans les cahiers des électeurs ; et qu’une fois la réforme opérée, la main du pouvoir disparaît à jamais des affaires de l’agriculture et de la propriété. De telles redites deviendraient à la longue fatigantes. Je crois plus utile en ce moment de présenter à l’appui de mon projet quelques considérations d’urgence.

Dans un grand nombre de départements, l’attention des habitants des campagnes s’est éveillée sur les conséquences probables de la Révolution de février, relativement à la propriété agraire. Ils ont compris que cette Révolution devait mettre fin à leur déshérence et leur procurer, non-seulement la vente de leurs denrées, non-seulement l’argent à bas prix, mais encore, mais surtout, la propriété.

Une des idées qui, sous ce rapport, ont obtenu faveur chez les paysans, c’est le Droit du cultivateur à la plus-value de la propriété qu’il cultive.

Un immeuble valant 40,000 francs est livré à bail à un laboureur, moyennant le prix de 1,200 francs, soit à 3 p. %.

Au bout de dix ans cet immeuble, sous la direction intelligente du fermier, a gagné 50 p. % de valeur : au lieu de 40,000 francs, il en vaut 60. Or, non-seulement cette plus-value, qui est l’œuvre exclusive du fermier, ne lui profite en rien, mais le propriétaire, l’oisif, arrive, qui, le bail expiré, porte le prix d’amodiation à 1,800 francs. Le laboureur a créé 20,000 fr. pour autrui ; bien plus, en augmentant de moitié la