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le fermier, métayer ou esclave vive), le surplus, tel quel, en autres termes la part du maître, est censé représenter le vingtième, le vingt-cinquième, le tren- tième ou le quarantième de la valeur totale du fonds.

Ainsi, trente-quatre années de fermage à 3 p. %, ou quarante années à 2 ½, couvrent la valeur de la propriété.

Le paysan, fermier ou métayer, pourrait donc rembourser la terre qu’il cultive en vingt-cinq, trente, trente-quatre ou quarante années, si le propriétaire voulait traiter à cette condition ; il la rembourserait même en vingt, dix-huit et quinze ans, s’il pouvait l’acheter sous la loi de l’annuité. Qui donc alors empêche le paysan de devenir partout maître du sol et de s’affranchir du fermage ?

Ce qui l’en empêche, c’est que le propriétaire exige d’être payé comptant, et qu’à défaut de comptant, il loue la terre, c’est-à-dire qu’il s’en fait payer à perpétuité.

S’il est ainsi, dira-t-on, pourquoi le paysan ne s’adresse-t-il pas au notaire ?

Ah ! c’est que le prêt d’argent, sur hypothèques et par main de notaire, se comporte exactement comme le fermage. L’intérêt stipulé pour cette espèce de prêt ne sert nullement à l’éteindre, et il est plus fort encore que celui qu’on paye pour le sol. Le paysan se trouve ainsi enfermé dans un cercle : il faut qu’il cultive éternellement sans posséder jamais. S’il emprunte, c’est un second maître qu’il se donne : double intérêt, double esclavage. Pas moyen de se tirer de là ; il faudrait le secours d’une fée.

Eh bien ! cette fée existe ; il ne tient qu’à nous d’éprouver la vertu de sa baguette : c’est la Banque foncière.