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Or, dites-moi, pour accomplir cette importante réforme, payer les dettes de l’État, faire défense à tous ministres, à l’avenir, de contracter au nom du Pays aucun emprunt, attendu que sous le nouveau régime cette pratique de la vieille finance sera complétement abandonnée ; supprimer toutes pensions, retraites, etc., parce que c’est aux départements, communes, corporations, associations, etc., de prendre soin de leurs invalides, comme de récompenser et décorer leurs serviteurs ; décharger, en un mot, l’Administration centrale de cette énorme gestion du Grand-Livre, de l’Amortissement, de la Dette flottante, des caisses d’Épargnes, de la distribution des croix, rubans, retraites et pensions : faut-il remanier dix fois encore notre constitution politique ? nous épuiser pendant cinquante ans en bacchanales parlementaires ? recommencer la tragi-comédie de 91, 93, 95, 99, 1804, pour finir par 1814, 1830 et 1848 ? user jusqu’à la Nation, avec ces billevesées de Législation directe, Gouvernement direct, et autres, qu’enfante tous les jours le cerveau malade des chefs de partis et d’écoles ?…

Le Peuple, en immense majorité, ne sait pas même qu’il a des dettes. Il ignore ce que c’est qu’amortissement, consolidation, conversion, annuités ; il serait étrangement scandalisé si on lui disait ce que c’est qu’un Emprunt à 55, 70 ou 75. Il se passera peut-être un demi-siècle avant qu’il soit en état de comprendre ce fait, d’histoire élémentaire, que de 1789 à 1852, les choses ont été arrangées de telle façon dans le Gouvernement, qu’à la seconde de ces époques, après avoir balayé les dettes de l’ancien régime, le Peuple avait à payer de nouveau chaque année, sous les noms de Dette publique, Amortissement, Emprunts, Pensions, Retraites, une somme de plus de 400 millions de francs,