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sentirent qu’ils pouvaient faire d’une pierre deux coups : c’est ainsi qu’en 1848 la majorité honnête et modérée se trouva en mesure d’éconduire l’un après l’autre le parti du National et le parti de la Réforme. Au moment décisif, ils abandonnèrent le dictateur, qui devint la première victime de sa propre réaction. Comme Robespierre avait frappé Danton, comme il voulait frapper encore Cambon, Billaut-Varennes, et autres ; les modérés de la Convention, sur lesquels il avait compté, et qui en effet ne trompèrent pas son attente, le frappèrent lui-même ; les autres vinrent après. Le Gouvernement indirect, délivré de son plus rude adversaire, Danton, et de son plus hargneux compétiteur, Robespierre, put reparaître.

On a dit que Robespierre aspirait à la dictature, d’autres qu’il voulait le rétablissement de la royauté. L’une de ces accusations réfute l’autre. Robespierre, qui n’abandonnait pas plus ses convictions qu’il ne renonçait à sa popularité, aspirait à être chef du Pouvoir exécutif dans un Gouvernement constitutionnel. Il eût accepté une place au Directoire ou au Consulat ; il eût été de l’opposition dynastique après 1830 ; nous l’eussions vu après février approuver le Gouvernement provisoire : sa haine des athées, son amour instinctif des prêtres, l’auraient fait voter pour l’expédition de Rome.

Que ceux-là donc qui, avec plus de bonne foi que de prudence, suivant la trace de Danton, reprennent aujourd’hui la thèse du Gouvernement direct ; qui, comme Danton encore, rappellent au peuple ses imprescriptibles droits et lui crient : Plus de Dictateurs, plus de Doctrinaires ! que ceux-là ne l’oublient pas : la Dictature est au bout de leur théorie, et cette Doctrine, dont ils ont tant d’effroi, c’est celle du traître justement puni de thermidor. Le Gouvernement direct n’est autre