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premier coup vingt-cinq ans. Les organisateurs du Gouvernement direct pensèrent sagement que le Peuple, législateur, travailleur et soldat, ne pouvait remplir ses nobles fonctions, tandis qu’il labourait d’une main et combattait de l’autre ; qu’il fallait d’abord sauver la patrie, puis, quand le Peuple n’aurait plus rien à craindre, qu’il entrerait alors dans l’exercice de sa souveraineté.

C’est la raison qui fut donnée au Peuple, lors de l’ajournement de la Constitution de 93.

Trois mois, six mois, un an se passèrent sans que ni la Montagne ni la Plaine réclamassent la fin de ce provisoire inconstitutionnel, attentatoire à la souveraineté du Peuple. Le Comité de Salut public s’accommodait fort du Gouvernement révolutionnaire ; quant au Peuple, il n’avait pas l’air de faire grand cas du Gouvernement direct.

Enfin, Danton le premier, ayant parlé de la nécessité de mettre fin à la dictature des comités, fut livré au tribunal révolutionnaire, accusé de modérantisme, et envoyé à l’échafaud. L’infortuné ! Il était peut-être le seul, avec Desmoulins, Héraut-Séchelles, Lacroix, qui crût à la Constitution de 93, ou qui du moins voulût en faire l’expérience : il fut guillotiné. Le Gouvernement direct, aux yeux des habiles, était jonglerie pure ; Robespierre n’avait garde de permettre que l’on découvrît ce pot aux roses. Disciple exact de Rousseau, il s’était toujours prononcé nettement, énergiquement, ainsi que Louis Blanc l’a montré naguère, pour le Gouvernement indirect, qui n’est autre que celui de 1814 et 1830, le Gouvernement représentatif.

Je ne suis pas républicain, disait Robespierre en 91, après la trahison de Varennes ; mais je ne suis pas non plus royaliste. — Il voulait dire : Je ne suis ni