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de ma liberté, de mon travail, de la subsistance de ma femme et de mes enfants : et lorsque je compte poser avec vous des articles, vous renvoyez tout à un congrès, formé selon le caprice du sort ! Quand je me présente pour contracter, vous me dites qu’il faut élire des arbitres, lesquels, sans me connaître, sans m’entendre, prononceront mon absolution ou ma condamnation ! Quel rapport, je vous prie, entre ce congrès et moi ? quelle garantie peut-il m’offrir ? pourquoi ferais-je à son autorité ce sacrifice énorme, irréparable, d’accepter ce qu’il lui aura plu de résoudre, comme étant l’expression de ma volonté, la juste mesure de mes droits ? Et quand ce congrès, après des débats auxquels je n’entends rien, s’en vient m’imposer sa décision comme loi, me tendre cette loi à la pointe d’une baïonnette, je demande, s’il est vrai que je fasse partie du souverain, ce que devient ma dignité ? si je dois me considérer comme stipulant, où est le contrat ?

Les députés, prétend-on, seront les hommes les plus capables, les plus probes, les plus indépendants du pays ; choisis, comme tels, par une élite de citoyens les plus intéressés à l’ordre, à la liberté, au bien-être des travailleurs et au progrès. Initiative sagement conçue, qui répond de la bonté des candidats !

Mais pourquoi donc les honorables bourgeois composant la classe moyenne, s’entendraient-ils mieux que moi-même sur mes vrais intérêts ? Il s’agit de mon travail, observez donc, de l’échange de mon travail, la chose qui, après l’amour, souffre le moins l’autorité, comme dit le poëte :

Non bene conveniunt nec in unâ sede morantur
Majestas et amor !……