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quant à moi, ridicule. Ainsi la réaction, germe de despotisme, est au cœur de tous les hommes ; elle nous apparaît à la fois aux deux extrémités de l’horizon politique. Ce n’est pas l’une des moindres causes de nos malheurs.

Empêcher une révolution ! mais est-ce que cela ne vous semble pas une menace à la Providence, un défi jeté à l’inflexible destin, tout ce qu’on peut imaginer, en un mot, de plus absurde ? Empêchez donc la matière de peser, la flamme de brûler, le soleil de luire !

J’essayerai de montrer, par ce qui se passe sous nos yeux, que comme l’instinct de réaction est inhérent à toute institution sociale, le besoin de révolution est également irrésistible ; que tout parti politique, quel qu’il soit, peut devenir tour à tour, suivant la circonstance, expression révolutionnaire ou expression réactionnaire ; que ces deux termes, réaction et révolution, corrélatifs l’un de l’autre et s’engendrant réciproquement, sont, aux conflits près, essentiels à l’Humanité : en sorte que pour éviter les écueils qui menacent de droite et de gauche la société, le seul moyen, c’est, au rebours de ce que la Législative actuelle s’est vantée de faire, que la réaction transige perpétuellement avec la révolution. Accumuler les griefs, et si j’ose employer cette comparaison, emmagasiner, par la compression, la force révolutionnaire, c’est se condamner à franchir d’un saut tout l’espace que la prudence commandait de parcourir en détail, et mettre à la place du progrès continu, le progrès par bonds et saccades.

Qui ne sait que les plus puissants parmi les souverains se sont illustrés en se faisant, dans la mesure des circonstances où ils vivaient, révolutionnaires ?