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réfléchit que le contrat est l’acte par lequel deux ou plusieurs individus conviennent d’organiser entre eux, dans une mesure et pour un temps déterminé, cette puissance industrielle que nous avons appelée l’échange ; conséquemment s’obligent l’un envers l’autre et se garantissent réciproquement une certaine somme de services, produits, avantages, devoirs, etc., qu’ils sont en position de se procurer et de se rendre, se reconnaissant du reste parfaitement indépendants, soit pour leur consommation, soit pour leur production.

Entre contractants, il y a nécessairement pour chacun intérêt réel et personnel : il implique qu’un homme traite dans le but de réduire à la fois, sans compensation possible, sa liberté et son revenu. De gouvernants à gouvernés, au contraire, de quelque manière que soit constituée la représentation, la délégation, ou la fonction gouvernante, il y a nécessairement aliénation d’une partie de la liberté et de la fortune du citoyen : en retour de quel avantage ? nous l’avons précédemment expliqué.

Le contrat est donc essentiellement synallagmatique : il n’impose d’obligation aux contractants que celle qui résulte de leur promesse personnelle de tradition réciproque ; il n’est soumis à aucune autorité extérieure ; il fait seul la loi commune des parties ; il n’attend son exécution que de leur initiative.

Que si tel est le contrat, dans son acception la plus générale et dans sa pratique quotidienne, que sera le Contrat social, celui qui est censé relier tous les membres d’une nation dans un même intérêt ?

Le Contrat social est l’acte suprême par lequel chaque citoyen engage à la société son amour, son intelligence, son travail, ses services, ses produits, ses biens ; en retour de l’affection, des idées, travaux, pro-