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Il s’agit maintenant de savoir si l’Association est une de ces forces, essentiellement immatérielles, qui, par leur action, deviennent productives d’utilité et source de bien-être ; car il est évident que ce n’est qu’à cette condition que le principe sociétaire, — je ne fais ici aucune distinction d’écoles, — peut se produire comme solution du problème du prolétariat.

L’Association, en un mot, est-elle une puissance économique ? Voilà quelque vingt ans qu’on la préconise, qu’on en annonce merveilles. Comment se fait-il que personne n’en démontre l’efficacité ? L’efficacité de l’Association serait-elle, par hasard, plus difficile à démontrer que celle du commerce, celle du crédit, ou de la division du travail ?

Je réponds, quant à moi, catégoriquement : Non, l’Association n’est point une force économique. L’Association est de sa nature stérile, nuisible même, car elle est une entrave à la liberté du travailleur. Les auteurs responsables des utopies fraternitaires, auxquelles tant de gens se laissent encore séduire, ont attribué sans motif, sans preuves, au contrat de société, une vertu et une efficacité qui n’appartient qu’à la force collective, à la division du travail, ou à l’échange. Le public n’a point aperçu la confusion : de là, le hasard des constitutions de sociétés, leurs fortunes si diverses, et les incertitudes de l’opinion.

Lorsqu’une société, industrielle ou commerciale, a pour but, soit de mettre en œuvre une des grandes forces économiques, soit d’exploiter un fonds dont la nature exige qu’il reste indivis, un monopole, une clientèle : la société formée pour cet objet peut avoir un résultat prospère ; mais ce résultat elle ne le crée pas en vertu de son principe, elle le doit à ses moyens. Cela est si vrai, que toutes les fois que le même ré-