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ÉGYPTE : ART TYPIQUE

l’idolâtrie ou culte des idoles, c’est-à-dire de la beauté idéale.

En résumé, comme l’Egypte avait fait servir l’art à l’expression de l’idée, la Grèce, enchérissant sur cette donnée, le fit servir à l’expression de la beauté. L’art égyptien est plus dogmatique, plus métaphysique ; l’art grec est plus idéaliste. Il est incontestable qu’en passant de l’un à l’autre, l’influence de l’idéal augmente aux dépens de la notion proprement dite, et conséquemment du vrai, ou du moins de ce qui est réputé la vérité. Tendance redoutablequi a valu à la Grèce l’épithète de menteuse, Grœcia mendax, et qui, après l’avoir élevée au plus haut degré de gloire, devait la précipiter dans l’abîme de toutes les corruptions. Mais contre la beauté, toute protestation de la pensée philosophique ou réaliste est vaine ; la plus judicieuse critique reste sans résultat. La dialectique n’a pas prise sur l’idéal ; et ni le cœur, ni l’imagination, ni les sens ne peuvent s’inscrire en faux contre la beauté. Quelques réserves que nous imposent la raison etJa morale, la beauté nous attire, elle nous possède ; nous pouvons, par férocité de vertu, lui refuser notre hommage ; nous restons ses soupirants. Et quand le devoir et l’honneur nous arrachent à ses séductions, combien le sacrifice nous est amer !... L’idéal a’reçu du génie grec une expression qu’on ne surpassera jamais. Tous les artistes venus plus tard se sont inspirés de ses œuvres ; ils