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ÉGYPTE : ART TYPIQUE

une maladie pédiculaire, notre époque, c’est le vice dans tout son raffinement, le mal dans sa quintessence. Transporté dans la religion et la morale, cela s’appelle encore mysticisme, idéalisme, quiétisme et romantisme : disposition contemplative où le plus subtil orgueil s’unit à la plus profonde impureté, et que combattirent de toute leur énergie les vrais praticiens de la morale, Voltaire aussi bien que Bossuet.

J’ai dit en quoi consiste la liberté de l’art, ou, pour mieux dire, la personnalité artistique : redisons-le encore une fois pour l’instruction de ceux qui, ayant fait de l’art leur profession, pourraient, à leur détriment et au risque de leur considération, s’y méprendre. L’artiste est l’homme doué à un degré éminent de la faculté de sentir l’idéal et de communiquer aux autres, par signes, gestes, figures, descriptions, mélodies, son impression. Or, autant la transmission de la pensée par le langage ordinaire peut être dite impersonnelle, autant les moyens employés par l’artiste sont empreints de sa personnalité. La collection du Moniteur, voilà du style impersonnel, officiel ; l’Histoire de la Révolution par Michelet, voilà de la personnalité, de l’idéal, de l’art. Par sa personnalité, l’artiste agit donc directement sur la nôtre ; il a puissance sur nous, comme le magnétiseur sur le magnétisé ; et cette puissance est d’autant plus grande qu’elle s’exerce avec un idéalisme plus énergique, je veux dire, en me référant à mes observations