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ÉVOLUTION HISTORIQUE

sation s’animant, les plus vieux ont pris une pointe. Une fois en chemin pour s’en revenir, le grand air les a étourdis ; on devine le reste. Vraiment, si c’est là tout ce que l’artiste a voulu nous apprendre, il s’est trop donné de peine, et c’est fort inutilement qu’il a dépensé son génie et ses veilles.

Mais, hâtons-nous de le dire, il s’agit ici de bien autre chose. Ce qu’a voulu rendre Courbet, ce n’est point une scène plus ou moins risible d’ébriété ; ce n’est pas même le contraste, relevé avec malice, entre la gravité sacerdotale et une infraction aux lois de la tempérance : tout cela est du lieu commun le plus fade, indigne, je le répète, des honneurs de la grande peinture. Ce qu’a voulu montrer Courbet, à la façon des vrais artistes, c’est l’impuissance radicale de la discipline religieuse, — ce qui revient à dire de la pensée idéaliste, — à soutenir dans le prêtre la vertu sévère qu’on exige de lui ; c’est que la perfection morale cherchée par la foi, par les œuvres de dévotion, par la contemplation d’un idéal mystique, se réduit à de lourdes chutes, et que le prêtre qui pèche est victime de sa profession, bien plus qu’hypocrite et apostat.

Qui ne voit ici que l’idée d’une semblable composition ne pouvait tomber dans le cerveau d’un artiste que le jour où l’art, si longtemps esclave de son idéalisme dogmatique, aurait brisé sa chaîne, et, par la conscience définitivement acquise de son principe et