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ÉGYPTE : ART TYPIQUE

malheureux, bien maladroit, si sa Vertu se trouvait moins belle que sa rivale.

Le même principe doit être suivi pour l’histoire de Joseph. Ici, pas d’allégorie : la femme de Putiphar est une personne réelle, et elle est seule. Que fallait-il lui opposer ? L’image de son époux représentée dans l’appartement, Joseph invoquant l’amitié dont il est honoré, reculant devant une trahison, priant d’un visage consterné la pauvre femme de rentrer en elle-même, - en lui montrant son protecteur, à qui il doit tout. — Au lieu de cela, rien : une belle femme presque nue, haletante d’amour, la gorge au vent, sollicitant de la voix, du regard, de la main, un beau jeune homme qui se refuse, on ne sait, on ne voit, on ne devine pas pourquoi ; sans doute parce qu’il avait fait vœu de virginité ! Et pour rendre la situation plus impossible encore, l’artiste ne manque pas de saisir l’instant où il y a lutte entre les deux personnages, la femme cherchant à retenir de vive force l’inflexible, qui ne craint pas de lui faire violence pour se dégager. Tout cela est absurde.

Dans Suzanne au bain, l’impossibilité est d’un autre genre. Je n’examine pas si l’on doit s’en rapporter au récit biblique, qui veut que Suzanne, une femme du plus haut rang, un modèle de fidélité conjugale et de pudeur, se soit déshabillée toute nue en plein air, seule dans un jardin, pour se baigner. Je ne puis,