Page:Proudhon - Du principe de l'art et de sa destination sociale.djvu/241

Cette page n’a pas encore été corrigée
229
ÉGYPTE : ART TYPIQUE

lisme des deux antiques, observez d’abord que vous n’êtes pas à même de comparer les portraits avec les originaux ; en second lieu, que le grand mérite de ces bustes, c’est que leur auteur n’a pas rien fait que copier ses modèles, ce qu’eût pu faire tout aussi bien un mouleur ; il en a rendu, sans sortir de la vérité, la physionomie, l’air, ce je ne sais quoi qui fait qu’un portrait vous frappe, qui ne résulte pas de la matière, et qui est l’esprit. Voilà sans doute, si la critique que vous faites des bustes de M. Clésinger, que je n’ai pas vus, est juste, ce que cet artiste n’aura pas appris à faire, et où ceux d’il y a dix-huit siècles excellaient : il s’agissait pour lui, comme pour les anciens, de nous montrer les âmes des deux empereurs ; il n’a su que redresser les traits de leurs visages ; d’après le canon grec. La réalité physique, souvenez-vous-en, ne vaut que par l’esprit, par l’idéal qui respire en elle, et qui ne consiste pas seulement dans une certaine symétrie ou élégance de forme. Allez-vous donc, à force de chercher la réalité, sacrifier l’esprit à la matière, comme les adorateurs de la forme, à force de chercher l’idéal, ont sacrifié la vérité à une chimère ?

Je conclus donc, et cela de vos propres appréciations, que pour exécuter un portrait, à plus forte raison une scène de la vie sociale, l’intervention de l’idéal est absolument indispensable : non encore une fois qu’il s’agisse pour l’artiste de refaire, corriger et embellir