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Or, jetons une dernière fois les yeux sur la carte : il semble que la nature elle-même, après avoir fait cette position maritime à l’Italie, ait pris soin de la fortifier encore en prévision d’une lutte contre la France. Regardez cette enceinte de bastions qu’on appelle les Alpes, qui de Nice s’étend jusqu’au Valais : contre qui, je vous prie, est tournée cette immense forteresse ? Ce n’est pas contre l’Angleterre, ni contre la Russie, ni contre l’Allemagne, ni contre l’Autriche elle-même pas plus que contre la Suisse : l’Italie, par sa position maritime et continentale, est amie de tous les peuples, hors un seul, qui est le peuple français.


Cinq passages peuvent donner issue à une invasion des Français en Italie, et réciproquement à une irruption des Italiens sur la France : passage de Genève à la vallée d’Aoste par le Saint-Bernard ; chemin de fer du Mont-Cenis ; passage par le Mont-Genèvre ; chemin de fer de Coni ; passage de la Corniche.


Concentrez cent mille hommes à Turin, au centre du demi-cercle : ces cent mille hommes, pouvant se porter rapidement et en masse sur le point attaqué, suffisent à garder tous les passages ; tandis que pour triompher d’une pareille concentration de forces il faudrait, comme pour le siége d’une place, une armée triple ou quadruple. Où la France prendrait-elle cette armée, menacée qu’elle serait au Nord et à l’Est par l’Angleterre, la Belgique et le Rhin ? Supposant la France en guerre avec l’Italie seule, la partie ne serait toujours pas égale : l’armée ultramontaine pouvant se ravitailler et se renouveler sans cesse par le sud de la Pé-