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ses frais. La fédération devient ainsi le salut du peuple car elle le sauve à la fois, en le divisant, de la tyrannie de ses meneurs et de sa propre folie.


La Constitution de 1848, d’une part en ôtant au Président de la République le commandement des armées, de l’autre en se déclarant elle-même réformable et progressive, avait essayé de conjurer ce double danger de l’usurpation du Pouvoir central et de l’insurrection du peuple. Mais la Constitution de 1848 ne disait pas en quoi consistait le progrès, à quelles conditions il pouvait s’effectuer. Dans le système qu’elle avait fondé, la distinction des classes, bourgeoisie et peuple, subsistait toujours : on l’avait vu, lors de la discussion du droit au travail et de la loi du 31 mai, restrictive du suffrage universel. Le préjugé unitaire était plus vif que jamais ; Paris donnant le ton, l’idée, la volonté aux départements, il était facile de voir que, dans le cas d’un conflit entre le Président et l’Assemblée, le peuple suivrait son élu plutôt que ses représentants. L’événement a confirmé ces prévisions. La journée du 2 Décembre a montré ce que valent des garanties purement légales, contre un Pouvoir qui à la faveur populaire joint la puissance de l’administration, et qui a aussi son droit. Mais si, par exemple, en même temps que la Constitution républicaine de 1848, l’organisation municipale et départementale avait été faite et mise en vigueur ; si les provinces avaient appris à revivre d’une vie propre ; si elles avaient eu leur large part du pouvoir exécutif, si la multitude inerte du 2 décembre avait été quelque chose dans l’État en dehors du scrutin, certes le coup d’État eût