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l’industrie, le commerce, la banque, tout cela a-t-il protesté ? Les magasins et les ateliers se sont-ils fermés ? Les journaux ont-ils parlé ? Et aujourd’hui, qui proteste ? Les contribuables refusent-ils l’impôt et les conscrits le service ? Les théâtres ont-ils jamais moins chômé ? Quoi ! le ministère propose une loi de sûreté générale, le conseil d’État l’élabore, le corps législatif la discute et la vote, le sénat la sanctionne, les préfets et les tribunaux l’appliquent ; personne ne dit mot, partout on se soumet ; si vous demandez des nouvelles d’un transporté, sa femme, ses enfants, ne daignent vous répondre : et vous parlez de tyrannie ! On prétend qu’il existe des sociétés secrètes. Je ne demande pas si elles protestent en la qualité qu’elles existent, puisqu’elles sont secrètes. Mais on ne se réunit secrètement que pour agir au dehors plus sûrement : quelle protestation du dehors les sociétés secrètes ont-elles provoquée ? Certes, et j’en gémis, notre raison est trouble ; nos mœurs s’en vont ; nous avons perdu notre route ; nous sommes à cette heure aussi loin de la Révolution que de l’ancien régime. Mais jamais nation, en pareil travail d’avenir, ne fut moins tyrannisée que la nôtre ; ce qui nous pèse est plutôt la fatalité que le despotisme : pour l’honneur de la France, je proteste contre le régicide. Le régicide, grand Dieu ! c’est la condamnation du socialisme. Ôtez du dix-neuvième siècle la question sociale, le coup d’état du 2 décembre et la restauration de l’empire sont impossibles. Ôtez la question sociale, et Napoléon III dépose son acte additionnel ou il tombe. Êtes-vous résolus, démocrates, d’en finir à tout prix avec l’Empereur ? Pas besoin de bombes : ralliez-vous au comte de Paris.

À vrai dire, il n’existe ni tyran, ni despote ; c’est un rêve de l’imagination, un mythe. Il y a, selon les circonstances, des chefs de parti, comme il y a des chefs