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à la Justice, point de Justice ; il en est de la morale considérée en elle-même comme des contrats que font entre eux les citoyens : point de pénalité attachée à l’obligation, point d’obligation (art. 1142 du Code civil). Philosophe, dit Jean-Jacques Rousseau, tes lois morales sont fort belles ; mais montre-m’en, de grâce, la sanction.

Tel est donc, d’après la double acception du mot, le problème que soulève l’idée d’une sanction morale :

Il est certain que la Justice ne serait pas pour l’homme une loi, si, d’un côté, ses préceptes n’étaient revêtus d’un signe qui en garantisse l’absolue authenticité, et si, d’autre part, la pratique pouvait en être regardée comme indifférente. Malheureusement, il est tout aussi certain que jusqu’à ce jour la loi morale a paru complétement dépourvue de sanction, soit que dans son énoncé elle n’offre pas ce caractère d’authenticité et de certitude que requiert la conscience, et qu’on ait pu pour ce motif l’attribuer à l’arbitraire des hommes ; soit que les peines et récompenses qui s’y attachent aient été trouvées insuffisantes ou douteuses. En deux mots, de même que le droit et le devoir ont manqué jusqu’ici de détermination, ils ont manqué de sanction : il n’y a pas, pour la société moderne, de plus grand sujet de tristesse.

J’ai essayé, dans le cours de ces Études, de déterminer les conditions et catégories de la Justice dans la personne, la famille, la cité, l’économie publique, l’État, etc. Il ne m’appartient pas de dire jusqu’à quel point j’ai réussi. Mais, admettant ces déterminations comme exactes, vous me diriez encore, avec le citoyen de Genève : Philosophe, tes lois morales sont fort belles ; mais montre-m’en la sanction ? Où trouves-tu, d’abord, la signature du souverain Législateur ? Où est ce sceau éternel, sacro-saint, qu’a dû y apposer la Sagesse souveraine, et que nous croyons posséder, nous autres chrétiens, dans nos