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lui donner qu’un petit nombre de pages : je veux parler de la sanction morale.

Mais j’ai besoin auparavant de vous dire un dernier mot de vous, Monseigneur, et de ma biographie : sans cela vous pourriez croire que je vous garde rancune. Les bons comptes, dit le proverbe, font les bons amis.

Qu’est-ce, en définitive, qui vous rend la Révolution si odieuse ? Ah ! je vous en accorde volontiers le témoignage, et c’est pourquoi, malgré l’abîme qui nous sépare, je me sens prêt à vous tendre les bras : ce qui vous anime contre nous est l’intérêt sacré de cette loi morale dont vous nous accusez de méconnaître les conditions et les principes, tandis que je vous reproche de mon côté de l’ignorer, depuis alpha jusqu’à oméga. Vous dites, et vous avez su le faire répéter aux philosophes aussi bien qu’aux enfants et aux femmes, que là où manque la foi religieuse la morale est sans garantie comme sans base, et que, si l’incrédule est logique, ce doit être fatalement un scélérat.

Telle était, j’en suis sûr, la pensée qui vous animait, lorsque vous écriviez à ce correspondant dont le nom, par respect pour le vôtre, ne tombera plus de ma plume :

« Le fond de son caractère est l’irritation et l’aigreur contre la société, de laquelle il s’est cru banni par la détresse de sa famille. Ayant pu, par la force de son esprit, faire des études tronquées d’un côté, profondes de l’autre, il s’est dressé à lui-même un piédestal, sur lequel il voudrait recevoir l’hommage de l’univers, au préjudice de Dieu, qui est pour lui un rival. Proudhon n’est pas un athée ; c’est un ennemi de Dieu. »

Ennemi de Dieu, ennemi de la société, ennemi de tout ordre, de toute loi, de toute morale, dans votre pensée c’est même chose. Et pourquoi ? Je viens de vous le dire : parce que, selon vous, dans le système de la Révolution, irréligieuse par essence, comme il n’existe et ne peut