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à un chapeau, à une clef, à une baguette de coudrier, de découvrir une chose cachée ou perdue, de traduire avec plus ou moins de bonheur ce que pense celui qui l’interroge, il y a plutôt de quoi la plaindre que la féliciter. C’est le miroir qui réfléchit le soleil, le prisme qui en décompose les rayons : demandez à ce miroir une théorie de la lumière, et vous verrez ce qu’il vous dira.

La femme, malgré quelques prétentions assez hautement manifestées, ne philosophe pas. L’antiquité a eu son Hypatie, le dix-huitième siècle ses esprits forts femelles, et nous en connaissons qui, au lieu de repasser leurs collerettes, écrivent des commentaires sur Spinoza. Tout cela peut faire illusion à la multitude, qui, sous le rapport de l’intelligence, se rapproche plus de la femme que de l’homme. Mais on peut toujours, dans le livre d’une femme, après avoir retranché ce qui vient d’emprunt, imitation, lieu commun et grapillage, reconnaître ce qui lui est propre : or, à moins que la nature ne vienne à changer ses lois, je puis dire que ce résidu se réduit constamment, comme impression de lecture ou de conversation, à quelques gentillesses ; comme philosophie, à rien.

J’ai une petite fille qui, à trois ans, cherchant des mots pour les choses qu’elle voit, appelle un tire-bouchon clef de la bouteille ; un abat-jour, chapeau de la lampe ; l’éléphant du Jardin des Plantes, pied-de-nez ; un glaçon, pierre de glace ; les dents de son peigne, doigts du peigne, etc. Cette enfant a toute la philosophie qu’elle aura jamais et qu’une femme, par sa propre force, peut acquérir : des à peu près, des analogies, de fausses ressemblances, des drôleries, des variantes tout au plus ; mais rien de défini, ni analyse ni synthèse, pas une idée adéquate, pas ombre d’une conception. À la commandite des idées la femme n’apporte rien du sien, pas plus qu’à la