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tibilité et de progrès. Aussi, dit ce philosophe, l’histoire universelle est l’histoire de la liberté ; le monde oriental, le monde grec et romain, le monde chrétien, en sont les phases successives : c’est ce qu’il s’efforce de démontrer par l’ensemble, en négligeant les détails et tout ce qui est purement accidentel.

C’est déjà quelque chose de fâcheux qu’un système historique où l’on ne s’occupe que de l’ensemble, où l’on écarte les détails et toute la partie réputée accidentelle. Que ne peut-on pas faire de l’histoire, avec cette faculté d’élimination ? Il n’y a plus de réalité, plus de certitude.

Passons cependant. Sans doute, avec les idées nous allons posséder enfin le progrès, le progrès libre, le seul qui soit véritablement du progrès. Il n’en est rien : les idées de Hégel ne sont autre chose que la description de l’organisme intellectuel qui gouverne l’homme et la nature, de même que sa liberté n’est autre que la force aveugle qui pousse cet organisme, ainsi qu’il s’en explique lui-même :

« À la place de ces vaines discussions qui portent sur la nature et les limites de la connaissance, dit Hégel, il faut montrer comment la conscience naturelle devient savoir véritable et absolu : tel est le but de la phénoménologie. Elle présente la série des transformations que l’âme parcourt, comme autant de stations que la nature lui a marquées pour devenir esprit, par l’expérience de ce qui est en soi. » (Willm, Histoire de la philosophie allemande, t. III p. 400.)

Traduisons cela. Ce que la nature a fait pour nos corps et qui est l’objet de l’anatomie et de la physiologie, à savoir l’organisme, elle l’a fait également pour nos facultés, passions, instincts : c’est l’objet de la psychologie ordinaire ; elle l’a fait encore pour nos idées : ce qui veut dire que l’entendement est un organisme sui generis, comme l’âme et le corps.