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prière à Dieu pour sanctifier l’œuvre de chair ; et cela lui prenait quelquefois cinq ou six fois en une nuit. »

Voir encore, sur cet édifiant sujet, les histoires de Bussi et de Brantôme, les Contes de Boccace, de la reine de Navarre et de La Fontaine, les dialogues latins de Chorier, les bouffonneries conjugales de Rabelais, et toute la littérature amoureuse, avant et depuis la Réforme. Ou je me trompe fort, ou l’on se convaincra que sous l’influence de la dévotion chrétienne les mœurs du mariage ne furent véritablement autres que celles du concubinage, avec la bégueulerie de plus. C’est au dix-septième siècle que la réaction commence, et qui en donne le signal ? Je le regrette pour Molière autant que pour l’Église, cette réaction a pour auteurs les Précieuses.

Les prêtres, fascinés par leur mysticisme, en sont encore à savoir ce que sait toute honnête femme, qu’un homme qui a décidé de se marier a dit adieu à la passion ; que d’amant fougueux il devient aussitôt, par le fait de sa résolution, fiancé plein de réserve, de tendresse et de calme ; que le mariage, loin d’être une union pour le plaisir, est une société de continence mutuelle, et que ce mystère d’une génération sans tache, imaginé pour la gloire du Christ et de sa mère, se réalise à toute conception qu’un vrai mariage enveloppe de ses ombres.

Voici l’exorde d’un sermon prononcé il y a quelques années à Marseille, par un jésuite, dans une conférence de femmes :

« En ouvrant ces conférences, mes très-chères sœurs, je crois devoir vous féliciter sur le zèle que vous mettez à nous seconder dans notre sainte mission. Grâce aux efforts de quelques-unes d’entre vous, des brebis égarées ont été ramenées au bercail. Persévérez dans cette voie. Employez tout ce que vous avez de moyens de persuasion auprès de vos pères, auprès de vos frères, auprès de vos époux, auprès de ceux qui pourraient vous être chers à d’autres titres. Que jamais votre tra-