Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/254

Cette page a été validée par deux contributeurs.

plus haut de l’amour et du mariage, et de leur dégradation.

Il est consolant pour la moralité humaine de reconnaître que tous les vices, même les plus infects, ont pour point de départ une erreur du jugement produite par une illusion de l’idéal, et que c’est en poursuivant le beau et le bien, mais par une fausse route, que le cœur se souille et que la conscience se déprave. Ce que je vais dire, sans rendre le moins du monde excusable une passion en tout état de cause hideuse, aura du moins l’avantage d’alléger singulièrement le crime de ceux qui les premiers s’en firent les chantres et les panégyristes, en même temps qu’elle nous avertira, nous civilisés du dix-neuvième siècle qui déjà penchons du côté où s’abîma l’amour antique, de nous tenir sur nos gardes.

Je passe sur l’explication de saint Paul, qui croit avoir tout dit quand il attribue le phénomène qui nous occupe au culte des faux dieux :

« C’est pour avoir remplacé, dit-il, la gloire du Dieu incorruptible par des simulacres d’hommes et d’animaux, c’est pour avoir servi la créature au lieu du Créateur, qu’ils en sont venus à outrager leurs propres corps, et qu’ils ont été livrés à des passions d’ignominie. (Rom., chap. Ier.)

Il était tout simple que le christianisme, attaquant l’ancienne religion et la société fondée par elle, imputât au polythéisme les abominations dont il venait purger la terre. Mais sans compter que le christianisme n’a pas réussi dans son entreprise, et que les passions d’ignominie se sont perpétuées dans l’Église du Christ comme dans la synagogue de Bélial, il est clair que l’explication de saint Paul n’explique rien. Quel rapport y a-t-il entre l’idolâtrie et le péché de sodomie ? c’est ce que je vaudrais savoir, et que l’Apôtre ne me dit pas.