Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/236

Cette page a été validée par deux contributeurs.

XV

Mais, si le mariage était redouté du grand nombre en raison du décorum, des charges domestiques, des prétentions de la matrone, etc., il n’était pas plus facile, et par des raisons analogues, à quiconque l’eût voulu, de se donner une concubine ou hétaire. Que faire alors ?… Le paganisme avait osé se poser la question : il faut voir la réponse.

L’homme a besoin de s’honorer jusque dans le péché. Je n’aime point, je l’avoue, ces accommodements avec la conscience ; mais je ne puis m’empêcher de reconnaître ici, une fois de plus, le sens moral de l’antiquité. Elle avait porté haut la dignité de l’épouse ; elle avait honoré la concubine : laisserait-elle périr la femme vouée à l’amour universel, qui, ne pouvant devenir la compagne d’aucun, est condamnée à servir de maîtresse à tous ?

Il y avait donc, en dehors des épouses et des concubines, pour le service de l’amour passager et au plus bas prix, des courtisanes, comme il y en a parmi nous malgré les prescriptions du christianisme ; mais avec cette différence, que chez les anciens la religion intervenait en faveur de ces femmes, livrées par nos mœurs à la dernière des infamies. Elles étaient placées sous la protection de Vénus, elles servaient dans son temple ; leur dignité, si j’ose employer ce mot en parlant de femmes prostituées, était sauvée en quelque façon par le sacerdoce. On les appelait, dans le langage de l’Orient, d’où elles passèrent en Grèce, filles consacrées, en hébreu qadischoth, littéralement des saintes.

Il existe au Japon une coutume semblable et bien autrement perfectionnée.

« Au Japon, comme en Grèce, comme dans l’Inde antique et moderne, les femmes galantes par profession paraissent