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nomie domestique agricole, la politique des césars, les théories de Platon et d’Épicure. Racine, dans Phèdre, avait suivi cette route, indiquée par Boileau, et dont les chefs-d’œuvre de l’ironie moderne, en fermant le retour à l’ancien idéal, faisaient pour la littérature une loi.

Le tumulte révolutionnaire apaisé, la critique fournissant de précieux matériaux, la littérature devait donc chercher son idéal dans tout ce qu’avait, pour ainsi dire, abhorré la poétique des anciens : le positivisme de la science, à la place du mythe et de la légende ; la Justice inflexible, qu’une tradition des Grecs donnait pour première femme à Jupiter, répudiée par celui-ci pour la riche et orgueilleuse Junon ; la Vertu gratuite, que la conscience stoïcienne avait trouvée trop lourde ; l’Égalité, dont la notion seule met à néant toutes les données antérieures de l’esthétique, et rend impossible la continuation sur l’ancien pied du travail littéraire ; l’Économie sociale, qui sous le régime d’inégalité ne pouvait être connue que de nom ; le Travail, rejeté par Virgile à la porte des enfers, parmi les sombres divinités de la souffrance et du mal ; le Mariage, vainqueur de l’amour, sévère à la poésie, que Virgile ose à peine toucher, qui ne réussit dans Homère que par la naïveté de la religion qui le couvre et que le monde a perdue ; les luttes de l’esprit humain, ses angoisses et ses triomphes, bien autrement terribles que les orages de la passion, seule réputée dramatique ; la Mort, enfin : tel était le thème imposé à la littérature par la nécessité de l’histoire et la loi même de l’art.

En deux mots, c’était la raison juridique, devenue par l’universalité de son application et de son influence principe du vrai, de l’utile et du beau, raison esthétique et raison des choses.

Dites-moi maintenant qui, parmi tant de gens de lettres