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« Quand un peuple ne peut plus fournir d’aristocratie, c’est qu’il est épuisé. Et c’est un signe de décadence quand un peuple porte envie à son aristocratie.

« Il faut, pour nous sauver, que la bourgeoisie s’anoblisse : c’est la noblesse qui a fondé la nation. » (De la Restauration française, livre 3.)


Et pour faire de la bourgeoisie une nouvelle féodalité, nous savons la marche à suivre (voir le Manuel du Spéculateur à la Bourse) : il n’y manque que la consécration sacerdotale, elle ne fera pas faute.

Qu’est-ce que le culte ? Une représentation de la société.

L’homme qui, suivant la prescription de l’Apôtre, s’est dépouillé de sa conscience naturelle, et qui a revêtu comme une cuirasse la foi théologale, n’est plus qu’une marionnette dansant devant son idole, comme David dansait devant l’arche, à la grand’pitié de sa femme Michol.

Entrons à l’église pendant l’office, un jour de grande fête. Les places sont distribuées suivant les dignités : banc-d’œuvre, stalles pour les fabriciens, marguilliers, préfets de congrégations, autorités civiles et militaires ; la moyenne classe a des chaises payées au jour et à l’an ; la multitude, debout ou accroupie, s’entasse derrière les piliers, au fond des chapelles, hors de la vue du maître-autel et de la chaire.

Au prône, si le seigneur, prélat ou prince, y assiste, le prédicateur, qui est censé parler pour tout le monde, lui adresse nominativement la parole.

À l’offerte, les sommités reçoivent l’encens chacune à part ; tandis que le peuple en masse est régalé le dernier de trois coups d’encensoir.

C’est ainsi que l’Église fait entrer dans les âmes le respect de la hiérarchie. Que de fois, mais en vain, la conscience du peuple en murmure !