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Si les institutions civiles et judiciaires ont un sens ; si les lois de l’urbanité, si la noblesse, l’héroïsme, l’honneur chevaleresque, signifient quelque chose ; si la religion, que depuis trois siècles nous voyons progressivement s’éteindre, n’a pas été un phénomène sans portée, et si sa disparition appelle invinciblement un sentiment nouveau, plus réel, plus énergique, pour continuer son œuvre ; si la Justice enfin est le seul des préjugés humains devant lequel se taisent l’ironie et le blasphème, il faut en convenir, cette spontanéité, cet ensemble de manifestations, attestent dans l’homme la présence d’un sentiment supérieur, dont il est aussi impossible de rendre compte par la seule notion des nécessités sociales, qu’il est impossible d’expliquer l’amour par la seule nécessité de la génération.

La Justice est une loi nécessaire de la collectivité humaine : donc elle suppose dans l’individu, membre de cette collectivité, avec la notion de la loi, une faculté de conscience qui y corresponde ; donc cette faculté existe.

La Justice se définit, non-seulement comme notion d’un rapport, ce qui laisserait l’homme indifférent au droit et la société sans garantie, mais comme sentiment ou faculté : donc encore cette faculté existe.

Cette faculté juridique est attestée par le sens intime et le consentement universel : donc elle existe.

Elle est affirmée par la religion, qui pendant tout le premier âge de l’humanité la représente, la supplée, et à la fin s’identifie et s’absorbe en elle : donc elle existe.

Elle est manifestée par toutes les relations et institutions sociales, inexplicables dans leurs formes par la seule notion de l’utile : donc elle existe.

Elle subordonne, dirige, contient, réprime, sacrifie, en un mot balance, toutes les autres forces et facultés réunies : donc elle existe.

Nous verrons plus tard qu’elle seule rend raison de la