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l’Évangile que le pape, et qu’il met au rang des défenseurs de la liberté les apôtres, les évangélistes, Jésus-Christ ; quand enfin il défend contre les ultramontains les gallicans ? Mieux que personne, cependant, le Journal des Débats doit savoir que tous ces mots de matérialisme et spiritualisme, théisme et athéisme, religion et non-religion, hors de la métaphysique, n’ont plus de sens.

Je ne parle pas du Siècle, qui a repris avec un certain succès de boutique la petite guerre que le Constitutionnel faisait autrefois aux jésuites. Le Constitutionnel, en passant à la contre-révolution, est devenu logique ; le Siècle plaidant à la fois pour la démocratie et l’Évangile, affirmant ex æquo la liberté et la religion, le travail et la charité, Saint-Simon et le Christ, déblatérant au nom de Dieu contre les Prophéties et les miracles, est à la hauteur de sa clientèle.

Pourquoi M. Henri Martin, pour ne citer que ce seul exemple parmi nos historiens providentialistes, présente-t-il Jeanne d’Arc comme une envoyée du ciel, revêtue de la mission spéciale de délivrer la France des mains des Anglais, quand il résulte de son propre récit que cette jeune enthousiaste ne fut que l’expression de la pensée universelle, aussi simple que féconde, qui consistait, en 1429 comme en 1793, à soulever le peuple et à le jeter en masse sur l’ennemi ? C’est, il faut bien le dire, que M. Henri Martin en est encore à placer les causes de l’histoire hors de l’histoire même, ce qui signifie que s’il la raconte bien il ne la comprend pas.

Pourquoi le conseil de l’instruction publique fait-il expurger Voltaire ? Pourquoi proscrit-on Diderot ?

Pourquoi l’Académie française ne propose-t-elle jamais pour le grand prix de 30,000 fr. que des œuvres évangéliques, d’une piété et d’une orthodoxie irréprochables ? Pourquoi les œuvres qu’elle couronne, fidèles à ce qu’on