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— On nous trompe, s’écrie cette multitude furieuse, quand on nous montre l’âge d’or dans le passé : il est devant nous. Marche, marche, empereur !… marchez, départements ; marchez, communes ; marchez, compagnies anonymes ; marchez, chefs d’industrie !… Tirez de la pierre, fondez du fer, construisez des machines, des vaisseaux, des wagons, des ponts, des ports, des routes, des chemins de fer, des palais, des églises, des théâtres, des boulevards !… Empruntez, endettez-vous, faites-vous un mobilier d’exploitation, d’habitation et de luxe, qui dépasse dix fois la proportion de votre revenu et de vos débouchés. Et quand vous serez à fond de caisse, la banqueroute. Mais il faut que nous travaillions et que nous mangions : Du pain ou du plomb !

« Que le pouvoir et la bourgeoisie le sachent donc ; que la magistrature et l’Église, que l’enseignement et l’armée, que tout ce qui se sent de la valeur et qui a quelque chose à perdre, y songent ! Le temps presse, et puisqu’à tout propos la Révolution parle de science, c’est à la science de nous délivrer d’elle.

« Oui, nous le redirons avec la sagesse des siècles, il faut que la multitude serve, qu’elle travaille en humilité et obéissance, et que sa vie soit réglée en toute chose. Sans cela, point de salut pour la civilisation, fondée de toute éternité sur l’inégalité des personnes, et, par suite, des fortunes. Mais il faut aussi que cette multitude mange et qu’elle puisse nourrir ses rejetons. Ces deux principes posés, la nécessité d’une classe privilégiée et la nécessité d’assurer la subsistance à la classe travailleuse, comment rétablir entre elles cet équilibre que l’esclavage chez les anciens, que le servage dans les temps féodaux, avaient jusqu’à certain point réalisé, et dont la Révolution française est venue brusquement changer les conditions ?

« Le christianisme avait apporté une chose nouvelle