Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/204

Cette page a été validée par deux contributeurs.

et ce n’est pas sans raison que le Juif Josèphe, et bien d’autres à son exemple, regardèrent l’empereur comme le messie. Mais précisément parce que quelques-uns trouvaient le messie dans César, le messie symbolisait l’idée : qu’importait après cela le choix de la personne ?

Ce qui, du reste, assura au judaïsme et à la secte qui s’en détacha la prépondérance dans le nouvel ordre d’idées, ce fut son histoire.

XXIV

Le judaïsme avait été une religion d’affranchissement. Les livres juifs sont pleins du souvenir de la servitude d’Égypte ; dans les institutions tout en parle, tout la rappelle. La servitude de Babylone avait laissé une impression encore plus profonde ; et maintenant, après la mort d’Agrippa, dernier du sang des Macchabées, la Judée, réduite en province romaine, gémissait avec le monde entier sous une oppression qui semblait ne pouvoir plus finir.

Il y eut un jour cependant où le monde put se croire libre. Au même moment, les Juifs se révoltent dans la Palestine, les Numides dans l’Atlas, les Bagaudes dans la Belgique ; l’Espagne s’ébranle. Pour comble, trois prétendants à l’empire s’élèvent à la fois ; la guerre civile dévore l’Italie, de vastes incendies consument les villes et les temples, un tremblement de terre fait tomber le Capitole.

Les peuples effrayés crurent à la fin du monde : cet effroi sauva l’empire. Les traditions étaient perdues. Ni foi, ni patriotisme ; rien que le chagrin de la servitude : c’était trop peu pour la liberté. Partout le bourgeois n’attendait son salut que de la faveur de César ; abandonnée à elle-même, la plèbe restait impuissante. L’insurrection, promptement réprimée dans la Gaule et l’Afrique, fut