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la philosophie spiritualiste, ancienne et moderne, nie la possibilité d’une solution juridique : il affirme, comme je l’ai dit, l’infériorité du travail, l’éternité, la nécessité, la providentialité de la misère. — Que parlez-vous, dit-il, socialistes et malthusiens, de science économique, d’abolition du paupérisme, de problème du crédit, d’équilibre des salaires, d’égalité des fonctions, de fusion de la bourgeoisie et du prolétariat, et de cent autres chimères qui troublent la société depuis un quart de siècle, et qu’a vomies sur le monde la Révolution ? Ne savez-vous pas, aveugles, que la Bonté divine ne vous a rien laissé à faire ; qu’elle vous a réfutés d’avance, il y a dix-huit cents ans. Vous parlez de science, comme Pilate demandant à Jésus : Qu’est ce que la vérité ? sans daigner seulement l’entendre. Mais la science est devant vous ; elle s’est révélée au monde et vos ténèbres ne l’ont pas comprise. Il n’y a pas d’autre science que celle qui s’est manifestée dans l’Évangile : Et verbum caro factum est.

Eh bien ! Monseigneur, je soutiens précisément que l’Évangile est lui-même la preuve qu’il y a autre chose encore à attendre que l’Évangile ; je soutiens, dis-je, que le précepte de charité a pour conséquence nécessaire de produire le précepte de Justice, et je le prouve, d’abord par la série des idées, puis par toute votre tradition.

Après la période inorganique et légendaire, dont j’ai parlé au chapitre précédent, une première législation fut donnée pour consacrer l’esclavage, la distinction des castes : ce fut la loi d’égoïsme, dont Moïse nous fournira tout à l’heure un exemple.

La loi d’amour, exprimée par l’Évangile, est venue ensuite, antithèse de la loi d’égoïsme, et supposant un troisième terme, une synthèse, qui ne peut être que la loi de justice.

Les extrêmes d’abord, incomplets, inféconds ; la syn-