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suivrait le retour du Christ, l’espoir des voluptés matérielles. Mais il les surpassait tous par son prodigieux dogme de la résurrection des corps, sans lequel l’immortalité des âmes n’eût paru elle-même qu’une fiche de consolation.

Certes, ce ne fut pas la moindre addition que Paul et les autres se permirent à la doctrine du Galiléen. Mais ainsi se forment les religions. Une religion est un symbole, ce qui veut dire une cotisation. Le pharisaïsme devait payer son écot dans celle-ci : Jésus, qui pendant sa vie n’avait cessé de le poursuivre, lui dut après sa mort l’avantage, sans lequel il ne fût pas devenu dieu, de ressusciter.

Un cœur de Juif pouvait-il goûter la survivance de l’âme à la façon métaphysique des stoïciens ? Qu’est-ce que cela, une âme ?… Cela peut-il manger, boire et faire l’amour ?… Le pharisaïsme affirmait donc l’immortalité, non plus par une creuse et obscure métempsycose, non par la conservation, au sein de l’éther, de cette particule de la divinité, divinæ particulam auræ, comme disaient les philosophes, qui forme la quintessence de notre être, mais au moyen d’une belle et bonne résurrection en corps et âme, et, ce qui valait mieux, très-prochaine.

Tous ceux qui seraient morts dans la foi du Christ devaient ressusciter pour régner avec lui ; la génération contemporaine ne passerait point avant que cette résurrection arrivât. Au deuxième siècle, les rédacteurs des Évangiles, qui n’ont rien vu encore, croient néanmoins devoir répéter la promesse. Puis on ajourne la résurrection au troisième siècle, puis on la calcule pour le cinquième. De siècle en siècle, le millénarisme refait ses supputations. Enfin, l’attente étant toujours trompée, on prit le parti de retourner l’annonce. On avait dit d’abord que le Messie, revenant peu de temps après son ascension,