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épuisés, haletants, embrassent la religion du plaisir. Virgile, qui chanta la régénération romaine, le messianisme de César, appelle tour à tour à son aide la philosophie d’Épicure, la science d’Archimède et la métaphysique de Platon. Pas plus que les autres il ne croit à la vertu patriotique, et se sauve dans l’humanité.

Quelques-uns protestent en faveur des mœurs antiques, par haine du prince, dégoût de la multitude, regret de leurs honneurs : ils sont si bien de leur siècle, qu’ils ne pensent même pas que cette vieille république, si elle pouvait renaître, serait le seul et efficace remède à la peur de la mort.

XLII

Nous touchons à la transition qui amènera bientôt le christianisme. À défaut d’une communion qui n’est plus, et dont on ne sait même pas se rendre compte, on demande une foi ! Le stoïcisme apporte son dogme, aussi impuissant que celui d’Épicure.

Sorte de platonisme pratique et sévère, le stoïcisme prend le contre-pied d’Épicure : il foule aux pieds la volupté ; il nie que la douleur soit un mal ; dans la vertu seule il découvre le souverain bien, dans le vice la souveraine misère, et enseigne à mépriser la mort, en élevant à la hauteur d’une déduction métaphysique la vieille, l’impure croyance aux revenants, la Superstition !

Avec quel art il la décore !

« Le monde est un être animé, vivant ; Dieu en est l’âme : et comme l’âme et le corps de l’homme forment un sujet unique, de même Dieu et le monde forment un tout inséparable, qui est l’Absolu.

« De cet Absolu font partie les corps et les âmes, dont l’union constitue notre vie, dont notre mort n’est que la séparation. Après le trépas, le principe animique rentre en Dieu, âme universelle ; le corps est rendu aux éléments. »