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de la suivre, nous pourrions y résister sans être coupables. Le flambeau qui nous guide, et la loi qui nous oblige, ne sont pas la même chose. »

Mgr Gousset, dans les notes qu’il a jointes au Dictionnaire, développe ainsi l’idée de Bergier :

« Aucune raison purement philosophique ne peut établir la distinction du bien et du mal. Le philosophe qui a le bonheur d’avoir des idées justes et précises sur une question si importante reste néanmoins impuissant pour convaincre d’erreur, par sa propre raison, le philosophe qui a des idées contraires. »

Et plus bas :

« On peut demander si naturellement et d’elle-même la conscience a la notion du bien et du mal. Les observations que nous avons faites sur les articles Certitude, Évidence, Foi, Langage, Raison, Révélation, Vérité, démontrent que cette notion est, comme toutes les autres, transmise à l’homme par la tradition, et qu’il ne peut la trouver que dans la société. Or, la société elle-même a reçu de Dieu les notions qu’elle dépose dans la conscience de chaque homme : c’est Dieu qui les lui a enseignées. Donc, encore une fois, c’est Dieu qui est le premier auteur de ces notions, et c’est sur Dieu que repose leur démonstration philosophique.

« Donc la science morale doit être nécessairement attachée à l’idée de Dieu, c’est-à-dire à la Révélation… »

Et comme pour justifier l’observation de Mgr Gousset, nous voyons les philosophes, ceux du moins qui admettent une morale supérieure à l’égoïsme, J.-J. Rousseau, Kant, M. Cousin, J. Simon, J. Reynaud, J. Oudot, rattacher à Dieu et à une révélation, historique ou psychique, les lois de la morale.

Quant aux philosophes qui nient toute espèce de révélation ou n’en tiennent aucun compte, tels que Saint-Lambert, d’Holbach, Bentham, Hégel et les panthéistes modernes, ils retombent, sous le nom de Loi naturelle, dans l’égoïsme, l’utilitarisme, l’organisme et