Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/85

Cette page a été validée par deux contributeurs.

à la réaliser, en y soumettant tout ce qui l’environne. (Déf. 5, Ax. 4.)

Appliquant ces principes à l’homme qui vit en société, je conclus :

La condition sociale ne peut pas être pour l’individu une diminution de sa dignité, elle ne peut en être qu’une augmentation.

Il faut donc que la Justice, qui est le nom générique donné aux mœurs du sujet constitué en société, soit également, pour être quelque chose, réalité et idée ; qu’elle soit une puissance de son âme, en même temps que le rapport de subordination qui l’unit à la société ; qu’il la sente en lui-même par sa conscience, comme il sent l’amour, l’ambition, la volupté ; qu’il la connaisse par son entendement ; qu’il soit assuré de l’excellence de cette loi, tant au point de vue de sa félicité personnelle qu’à celui de la conservation du groupe social ; que par elle enfin s’expliquent tous les faits de la vie collective, ses établissements, ses utopies, ses aberrations ; de sorte que la Justice, par qui tout est dans le tout social, sans laquelle rien ne peut être, apparaisse comme le premier et le dernier mot de la destinée humaine, individuelle et collective, la sanction initiale et finale de notre béatitude.

Dans ces conditions la science des mœurs, la science d’une conscience régie par une double loi, est-elle possible ?

Ce qui revient à dire : La société est-elle possible ? L’individu lui-même est-il possible, puisqu’il n’existe que dans la société ? et la loi qui est censée régir cet antagonisme n’est-elle pas plutôt fiction pure, suggérée par la nécessité, et créée contre la tourbe des imbéciles pour la glorification des plus forts ?

Tel est le problème, dont la solution préalable peut seule donner ouverture à une science de la Justice ou de