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Je pose simplement ici la question, dont on trouvera, dans le cours de ces Études, la solution irréfragable et toute nouvelle.

Or si le christianisme n’est autre chose que le développement nécessaire, théorique et pratique, du concept religieux, de quelque manière et à si faible degré qu’il se pose, n’est-il pas d’une souveraine déraison, pour ne pas dire d’une insigne mauvaise foi, sous prétexte d’épuration religieuse ou de théologie rationnelle, de ramener les esprits de quinze, vingt ou trente siècles en arrière, et de leur présenter cette rétrogradation comme un progrès ?

Nombre de ces mystiques, incapables apparemment d’analyser le principe de leur foi et d’en suivre les conséquences, se prononcent contre le droit divin, affirment la Révolution, se disant en même temps sectateurs d’une Religion naturelle, laquelle, selon eux, se connaîtrait par les seules lumières de la raison, et n’exige ni culte extérieur ni sacerdoce.

Mais toutes ces idées de Dieu, de Ciel ou de vie future, de révélation, de sacrements, d’Église, de culte, de sacerdoce, ne forment-elles pas, dans l’entendement humain comme dans la pratique des nations, une chaîne indissoluble ? Et s’il en est ainsi, n’est-il pas clair que le premier anneau de cette chaîne répugne à la Révolution et à la Justice autant que le dernier ? La preuve, c’est qu’il existe, à l’état embryonnaire, je ne sais combien d’églises prêtes à s’emparer de la succession du catholicisme, je ne sais combien de papes attendant la mort de Pie IX pour prendre sa tiare !