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par des lois immanentes et fixes ; elle est déchue de cette condition, désorganisée, livrée à l’esprit de désordre, incapable par elle-même de retrouver l’équilibre et de s’adonner à la Justice.

De là, d’abord, cette inégalité de rangs et de fortunes que le paganisme attribuait à la nécessité, que les économistes modernes, d’accord avec les politiques, rapportent à la même nécessité, et qui n’est autre, suivant l’Église, que la conséquence du péché.

De là, en second lieu, l’impuissance des gouvernements à qui le droit ne saurait suffire, et que l’antagonisme, l’inorganisme, les révolutions, dévorent.

Possible que dans cet état de déchéance l’humanité ait conservé un souvenir confus de sa loi, qui est l’égalité : c’est ce qu’expliqueraient ses aspirations juridiques, et ses incessantes révoltes ; mais, sevrée qu’elle est de la grâce d’origine, livrée à toutes les contradictions du mauvais esprit, au sein d’une nature devenue rebelle, ses tentatives demeurent fatalement infructueuses, ses institutions sont toujours utopiques, et tôt ou tard dégénèrent en anarchie. Il n’y a pas, sur cette terre, d’équilibre stable dans l’économie de la société ; il n’y a pas de gouvernement normal pour les nations. Le paupérisme et la tyrannie, l’égoïsme, l’ambition, l’envie, l’orgueil, au-dessus la raison d’État : tel est notre lot à jamais.

Tout ce qui nous reste à faire et que nous prescrit l’Église est d’opérer, en vue du monde à venir, notre réconciliation avec Dieu, en subordonnant à ce grand but et notre économie publique, et nos gouvernements…

Concevons donc une bonne fois que, la fin de l’homme n’étant point ici-bas, tout dans le présent doit être ordonné pour cette fin supérieure, qui nous est annoncée et garantie par la religion.

Le temps que nous avons à passer dans cette vallée de