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que circonstance qu’elle se trouve compromise, et à quelque risque que nous expose sa défense.

3. Ce respect est au plus bas degré chez le barbare, qui y supplée par la religion ; il se fortifie et se développe chez le civilisé, qui pratique la Justice pour elle-même, et s’affranchit incessamment de tout intérêt personnel et de toute considération divine.

4. Ainsi conçue, la Justice est adéquate à la béatitude, principe et fin de la destinée de l’homme.

5. De la définition de la Justice se déduit celle du droit et du devoir.

Le droit est pour chacun la faculté d’exiger des autres le respect de la dignité humaine dans sa personne ; — le devoir, l’obligation pour chacun de respecter cette dignité en autrui.

Au fond, droit et devoir sont termes identiques, puisqu’ils sont toujours l’expression du respect, exigible ou dû ; exigible parce qu’il est dû, dû parce qu’il est exigible : ils ne diffèrent que par le sujet, moi ou toi, en qui la dignité est compromise.

6. De l’identité de la raison chez tous les hommes, et du sentiment de respect qui les porte à maintenir à tout prix leur dignité mutuelle, résulte l’égalité devant la Justice.

La modestie est une forme de la Justice, une façon polie de dire que, tout en réservant les droits de notre dignité, nous n’entendons pas nous élever au-dessus de nos semblables et causer aucun préjudice à leur amour-propre. Les anciens avaient un vif sentiment de cette vertu ; leurs biographies, autant que leurs harangues, en offrent de beaux modèles. Chez les chrétiens elle dégénère en affectation d’humilité, elle est fausse.

L’orgueil, l’ambition, la gloire, violent ouvertement la Justice. Elles appellent méfiance, haine, répression :