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de poltronnerie et de bêtise ; une plèbe qui s’affaisse dans l’indigence et les mauvais conseils ; la femme enfiévrée de luxe et de luxure, la jeunesse impudique, l’enfance vieillotte, le sacerdoce, enfin, déshonoré par le scandale et les vengeances, n’ayant plus foi en lui-même, et troublant à peine de ses dogmes mort-nés le silence de l’opinion : tel est le profil de notre siècle.

Les moins timorés le sentent et s’en inquiètent. — « Il n’y a plus de respect, me disait un homme d’affaires. Comme cet empereur qui se sentait devenir dieu, je sens que je deviens fripon, et je me demande à quoi je croyais quand je croyais à l’honneur ? »

Le spleen me gagne, avouait un jeune prêtre. — Lui qui par ses fonctions, par sa foi, par son âge, eût dû être à l’abri de ce mal anglais, sentait en son cœur s’affaisser la vie morale.

Est-ce là une existence ? Ne dirait-on pas plutôt une expiation ? Le bourgeois expie, le prolétaire expie, le Pouvoir lui-même, réduit à ne gouverner plus que par la force, expie.

« L’esprit de l’homme, dit M. Saint-Marc de Girardin, a perdu sa clarté ; le cœur n’a plus de joie. Nous nous sentons dans le brouillard, nous trébuchons en cherchant notre chemin, et cela nous rend tristes. La gaieté est chose rare de nos jours, même chez la jeunesse. »

Cette nation n’a pas de principes, disait de nous, en 1815, lord Wellington. — Nous nous en apercevons à cette heure. Avec quel surcroît d’épouvante Royer-Collard, témoin de notre défaillance, répéterait ses paroles de la même époque :