Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/150

Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Dieu est tout ce qui est, intelligence et matière, tout ce qui peut se voir et tout ce qui peut se comprendre. Tout est en lui et par lui. Nul de nous n’est hors de lui, mais aucun de nous n’est lui. Chacun de nous vit de sa vie, et tous nous communions en lui. »

Suivant une autre exégèse :

« Le Dieu chrétien ne s’était incarné qu’en Christ ; le Dieu saint-simonien s’incarne dans l’humanité. »

Voilà le dogme, renouvelé de saint Paul, de Spinoza, etc. Tout en nous donc, le corps aussi bien que l’âme, participant de la nature divine, il semble que nous devions être cette fois à l’abri de toute déchéance. Il n’en est rien : la divinité de la chair, pas plus que celle de l’esprit, ne nous sauvera de la dégradation.

Après la réhabilitation de la chair, je trouve dans la doctrine dont M. Enfantin est resté le chef deux choses : le principe hiérarchique, adopté comme loi de l’organisme social ; et la formule d’hiérarchie, À chacun selon sa capacité, à chaque capacité selon ses œuvres.

Or, qui est le juge de la capacité et de l’œuvre ? Le prêtre, le couple sacerdotal, représentant par son androgynie la dualité substantielle de Dieu ; le prêtre, initiateur et chef de la religion. C’est sur la judicature sacerdotale qu’est fondée la hiérarchie saint-simonienne.

Juge de la capacité !… Prosterne-toi, Église du Christ. Tu n’as humilié que la chair, l’église de Saint-Simon humilie l’esprit. C’est par la titillation de la chair que suivant toi nous étions déchus ; suivant Saint-Simon, ou plutôt suivant son vicaire, M. Enfantin, c’est par les fausses suggestions de notre entendement. C’était le corps et tout ce qui s’y rapporte que tu voulais en conséquence châtier ; c’est à la conscience que s’adresse cette nouvelle discipline. L’inégalité sociale, nous disait la révélation chrétienne, est l’effet de la révolte des sens. Erreur,