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CHAPITRE II.

Identité de la dignité personnelle et du droit chez les anciens. Subordination de l’idée religieuse

III

Si l’on étudie avec attention le système des institutions sociales chez les anciens, on ne tarde pas à s’apercevoir que ce système reposait tout entier sur deux idées subordonnées : la Justice, qui concernait le sujet humain, dérivant de lui seul, formulée et organisée pour lui seul ; et la Religion, relative à l’être surnaturel, auteur supposé des lois et formules juridiques, d’après la suggestion mystique de la conscience.

Chez les races gréco-latines, qui firent toujours passer le pouvoir religieux ou sacerdotal après le pouvoir politique ou judiciaire, sans les séparer toutefois d’une manière radicale, le Droit fut la même chose que la dignité ou prérogative personnelle ; la Religion était la garantie, la caution, pour ainsi dire, fournie par les dieux, de cette même prérogative, dont la loi, émanée d’eux-mêmes, n’était que la détermination. La dignité, comme la volonté, la liberté, étant indéfinie de sa nature, la Religion intervenait avec ses préceptes pour lui donner des bornes.

Ainsi le Droit, la chose capitale de la société, avait le pas sur le culte, qui lui servait d’étai. La même subordination s’observait entre le magistrat, organe de la Justice chargé de dire le droit, juri dicundo, d’après la formule consacrée, et le prêtre, ministre ou héraut de la garantie divine, chargé d’en découvrir le signe dans le vol des oiseaux et les entrailles des victimes.

La langue latine témoigne vivement de la nature de