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car jamais parole aussi forte n’aura été prononcée sur elle. Que l’homme pense de Dieu et de l’autre vie ce qu’il voudra : avant tout il est né pour la Justice, et son bonheur, sa récompense, est dans sa fidélité à la loi. En lui est le principe de ses mœurs, leur raison, leur vertu, leur sanction. La Justice est l’efflorescence de notre âme ; la morale est l’anthologie de l’humanité. L’intervention d’une autorité surnaturelle dans les prescriptions de la conscience, loin d’ajouter à la vertu, ne fait que consacrer l’immoralité. O prêtres, vous ne direz pas toujours que la Révolution est une force négative, qu’elle ne produit que des ruines, qu’elle est impuissante à rien créer. La vie de l’homme est courte, et la Révolution ne date pas encore d’une vie d’homme. Votre livre des Évangiles ne fut mis au net qu’un siècle après la mort de Jésus-Christ ; et cependant, au commencement du quatrième siècle la secte chrétienne passait encore pour l’ennemie du genre humain. Nous avons marché plus vite, car voici que déjà, sur la poussière des croyances passées, l’humanité jure par elle-même ; elle s’écrie, la main gauche sur le cœur, la droite étendue vers l’infini : C’est moi qui suis la reine de l’univers ; tout ce qui est hors de moi est inférieur à moi, et je ne relève d’aucune majesté.

Ne vous signez pas. Monseigneur ; ne criez pas au blasphème, ne dites pas que celui qui vous discute vous outrage. C’est une vieille tactique de l’Église de traiter la libre pensée de sacrilége, et de brûler au lieu de répondre. Votre M. de Mirecourt ne m’a-t-il pas fait dire déjà que le christianisme était une vieillerie, une loque, tombant par lambeaux ? Aussi conclut-il :

« Dieu seul peut lui répondre avec sa foudre, à moins qu’il ne laisse aux hommes le soin de l’envoyer à Bicêtre. »

Non, Monseigneur, et je tiens à ce que vous en preniez acte, jamais je ne me suis exprimé sur la religion chré-