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tantôt les unités opposent à leur conversion une invincible résistance, et ne laissent, après la destruction de la série, que leurs derniers éléments. En présence de ce fait, la pensée ne se reconnaît plus ; la raison s’étonne en voyant se rompre le fil de ses opérations ; et le moi intelligent, créateur de séries, confesse un non-moi anti-sériel, substantiel ou causatif, inintelligent et inintelligible…

Ainsi la métaphysique joint son autorité à celle du sens intime pour nous attester quelque chose hors de notre pensée ; l’idéalisme, tant objectif que subjectif, demeure convaincu de chimère, et les angoisses du scepticisme ne peuvent désormais nous atteindre[1].


CHAPITRE IV


l’économie politique


§ I. — Objet et circonscription de cette science.


364. « Usbeck à Hassein, dervis de la montagne de Jaron.

« Ô toi, sage dervis, dont l’esprit curieux brille de tant de connaissances, écoute ce que je vais te dire.

« Il y a ici des philosophes qui, à la vérité, n’ont point atteint jusqu’au faîte de la sagesse orientale ; ils n’ont point été ravis jusqu’au trône lumineux ; ils n’ont ni entendu les paroles ineffables dont les concerts des anges retentissent, ni senti les formidables accès d’une fureur divine : mais, laissés à eux-mêmes, privés des saintes merveilles, ils suivent dans le silence les traces de la raison humaine.

« Tu ne saurais croire jusqu’où ce guide les a conduits. Ils ont débrouillé le chaos et ont expliqué, par une mécanique simple, l’ordre de l’architecture divine. L’auteur de la nature a donné du mouvement à la matière : il n’en a pas fallu davantage pour produire cette prodigieuse variété d’effets que nous voyons dans l’univers.

  1. Cette démonstration du réalisme nous paraît tout à fait neuve en philosophie, et nous la recommandons, comme celle de l’origine des idées générales et des concepts, aux méditations des métaphysiciens. (Note de l’éditeur.)