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Amitié. ............… Terre. ............… Air. ............… Ambition.
Famille. ............… Eau. ............… Arome. ............… Amour.
FEU.
UNITÉISME. »


Je supplie le lecteur de ne pas s’impatienter en voyant une si prodigieuse aberration d’intelligence. Nous avons devant nous un esprit vigoureux, mais révolté et solitaire, qui cherche la vérité en dehors des notions communes, l’entrevoit un instant et s’égare misérablement. Fourier avait appris dans le catéchisme que les qualités des corps glorieux, après la résurrection, seront la clarté, l’agilité, l’impassibilité et la subtilité. Travaillant sur cette donnée, il entreprit de découvrir quels éléments entraient dans la composition de ces corps, et ce fut alors qu’il imagina de mettre en contredanse les éléments, avec les passions affectives pour partenaires. Dans ce quadrille, le FEU conduit la musique et commande les figures !

D’après cette contre-proposition de passions et d’éléments, il est démontré, selon Fourier, que le haut monde, où l’amour et l’ambition jouent le plus grand rôle, emploie pour ses corps les deux éléments subtils et actifs, éther et arome, et laisse au bas monde, où l’amitié et la famille sont dominantes, les éléments grossiers, terre et eau, « qui forment le corps de la lourde espèce humaine, plus pesante encore en intellectuel qu’en matériel. »

« Quant au feu, ajoute Fourier, à titre d’élément pivotal, il est commun aux deux sortes de corps, mais en degrés différents ; car nos corps cis-mondains sont hors d’affinité avec le feu, dont ils ne supportent que 32 degrés en chaleur et 24 en boisson. »

La série que je viens de rapporter d’après Fourier est du genre de celles que nous avons nommées systématiques : ai-je besoin de montrer qu’elle n’a de réalité que sur le papier ? Fourier procède ici comme dans une règle de proportion, où la simple opposition des extrêmes et des moyens indique le rapport des nombres. Ainsi réminiscence de catéchisme, réminiscence d’arithmétique : voilà ce qui fournit à Fourier le sujet et la forme de cette série. L’infortuné cherchait la dialectique sérielle et n’arrivait qu’à un vain symbolisme, à des analogies et des antithèses.

Autre chose était d’imaginer une combinaison systématique des éléments et des passions, autre chose de prouver que cette combinaison était conforme à la réalité. Fourier ne s’en met nullement en peine : la preuve, selon lui, que les corps des bienheureux sont composés d’éther et d’arome, résulte de l’analogie de ces éléments avec l’ambition et l’amour, et de leur opposition avec la terre et l’eau et leurs analogues, amitié et famille. Or, ceci est digne de