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qu’une des choses qui importent le plus à la Démocratie ouvrière, c’est, en même temps qu’elle affirme son Droit et dégage sa Force, de poser aussi son idée, je dirais plus, de produire tel quel son corps de Doctrine, afin que le monde apprenne du même coup que ceux qui de leur propre fonds possèdent le Droit et le Pouvoir, ont aussi, du fait de leur pratique intelligente et progressive, le Savoir. Tel est l’objet que je me suis proposé dans cet écrit. J’ai voulu, par un travail préparatoire, et sous réserve de l’opinion démocratique, juge en dernier ressort, donner dès à présent à l’émancipation ouvrière la haute sanction de la science : non que j’entende imposer à personne mes formules, mais convaincu que je suis que si la science, celle-là surtout qui a pris pour son objet les manifestations spontanées et les actes réfléchis des masses, ne s’improvise pas, elle n’en a pas moins besoin pour sa constitution d’aperçus synthétiques incessamment renouvelés, et qui, par leur caractère personnel, ne compromettent aucun principe, aucun intérêt.

Après l’éclosion de la conscience, c’est-à-dire du droit, arrive donc, dans les collectivités humaines, la révélation de l’idée. Cette marche est indiquée par la nature, et la psychologie l’explique. L’intelligence, chez l’être pensant, a pour base et condition première le sentiment. Pour se connaître, il faut se sentir : de là le soin avec lequel le Pouvoir, dans les sociétés aristocratiques et absolutistes, poursuit, réprime les réunions populaires, les conciliabules, assemblées, associations, réunions, tout ce qui en un mot peut exciter chez les classes inférieures la conscience. On veut empêcher qu’elles ne réfléchissent et ne se concertent ; pour cela le moyen est d’empêcher qu’elles ne se