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raison, s’il n’a pas en même temps avec lui une majorité qui l’appuie, attendu qu’entre lui et ses adversaires la question n’est pas précisément une question de droit, c’est une question de force. Or, si énorme que soit le personnel gouvernemental, il ne saurait tenir devant la majorité de la nation ; et puisque, par la nature des choses, le mécontentement inévitable de la nation la porte à se séparer insensiblement du Pouvoir et à se grouper contre lui, il est inévitable qu’un peu plus tôt ou un peu plus tard la nation ait prise sur son gouvernement. Ajoutez ici les cas d’imprudence, d’impéritie, de témérité, etc., de la part des hauts personnages de l’État, et vous n’aurez fait qu’ajouter de nouvelles probabilités à leur défaite.

Considérez maintenant que le Gouvernement est antipathique à toute critique et à tout contrôle, d’autant plus antipathique que ses attributions sont plus élevées, son mandat plus étendu, son personnel plus nombreux. Quiconque est constitué en autorité aspire à se rendre inviolable : la Charte de 1814 n’avait-elle pas rendu tels les propres adversaires du Prince, les Députés ?

Ainsi, à côté du chef de l’État il existe une administration de l’État, une justice de l’État, une armée de l’État, une marine, des travaux, des industries, une université, etc., de l’État, dont le personnel tout entier se considère comme faisant plus ou moins, à l’instar du Prince, partie intégrante de l’État ; qui compte dans le système pour un peu plus que ses services et traitements, et que vous ne sauriez assimiler à une bande de salariés que l’entrepreneur d’industrie embauche le matin et qu’il renvoie le soir après leur avoir payé leur journée. C’est le monde de