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YVETTE PROST

fils, l’adorable petit être en qui se mêlaient son âme et l’âme de Blanche. Le beau rire de Pomme ranimait l’espérance : oui, l’on sortirait de cette rude épreuve. Le docteur Ellinor, guéri, se rapprocherait de ses enfants, connaîtrait son petit-fils et une joie nouvelle et parfaite brillerait sur la maison.

Mais, entre ces flambées d’optimisme, que d’heures de doute !… Maman Galliane avait voulu qu’on installât dans sa chambre le petit lit de Pomme ; et, pendant ses insomnies inquiètes, Nérée souffrait de ne plus entendre le souffle paisible des deux créatures qu’il aimait plus que sa propre vie.

Lorsque sa mère et son fils étaient couchés, il s’en allait errer sur les routes, le plus souvent sur la plage, ruminant son inquiétude et son amour, cet inexprimable amour qui était devenu le principe même de sa vie. Il lui arrivait de prendre machinalement le chemin de l’hôpital hélio-marin, comme attiré par un aimant, et de se trouver seul, à minuit, dans le silence des bois, en face de ces murs derrière lesquels Blanche veillait et souffrait.

Il revenait le plus tard possible vers sa chambre muette où, de jour en jour, il sentait décroître la douce chaleur laissée par l’absente. Tristement, il cherchait sur chaque objet la chère empreinte, débouchait un flacon pour respirer le parfum familier, ouvrait la penderie et s’oubliait un moment à contempler les robes, dont certains plis semblaient emprisonner un geste de Blanche.

Dans cette atmosphère de lourde anxiété, un seul cœur s’épanouissait : Mme Horsel. Oh ! elle ne souhaitait aucun mal au docteur Ellinor ; elle désirait qu’il finît par guérir — mais lentement ! L’absence de Blan-