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LE COUPLE AU JARDIN

Durant vingt jours, l’état du malade demeura très inquiétant. La médication la plus énergique ne semblait avoir d’autre effet que d’entretenir un minimum de vie végétative. Mais les médecins répétaient : « Il faut s’armer de patience. »

Marc Ellinor était pleinement conscient. Aux questions qu’on lui posait, il répondait par un battement des paupières ou un geste à peine perceptible de la main, mais il ne parlait pas et demeurait dans le même état torpide, sans que sa physionomie exprimât un sentiment.

Pendant ces semaines anxieuses, Blanche vécut surtout de la force et de la foi que lui apportait son mari matin et soir.

Nérée ne pénétrait pas dans la chambre du malade. À son arrivée, une infirmière allait discrètement prévenir la jeune femme :

— Madame, on vient prendre des nouvelles.

Blanche accourait, si pâle, et les yeux trop grands dans une pauvre figure de fièvre. Il l’accueillait avec un sourire confiant ; mais, dans les bras qu’il lui ouvrait, elle tombait en fondant en larmes :

— Aucun changement. Nous ne le sauverons pas !

— On le sauvera, je te le dis, je te le promets. C’est plus qu’une conviction, c’est une certitude.

Et l’espoir tremblant de la jeune femme s’affermissait à cette assurance.

Nérée, en dépit de sa ferme attitude, n’était plus qu’un cœur tourmenté. Il vivait tout le jour dans l’attente du quart d’heure qu’il passerait auprès de sa femme. Chez lui, il accomplissait comme un automate la tâche quotidienne ; faisait un effort pour distraire sa mère et, surtout, pressait tendrement contre lui son