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LE COUPLE AU JARDIN

Un de ces soirs-là, après que les heureux parents se sont penchés sur leur trésor endormi, Blanche attire son mari sur la terrasse, dans le large fauteuil de rotin où l’on tient deux en se serrant un peu :

— Toi, il faut que je te gronde.

— Bon, soupire Nérée, je vais encore encaisser une réprimande au sujet de Monsieur Pomme !

— Justement. Je ne veux pas que tu deviennes un de ces pères ridicules qui prennent pour argent comptant tous les éloges faits de leur progéniture et qui ne s’aperçoivent pas que la conversation s’éternise sur les espiègleries du jeune prodige. Mon Nérée, si modeste en ce qui concerne sa propre personne, laisse s’épanouir un orgueil démesuré dès qu’il est question de son fils.

— C’est bien. Je prends note de l’observation. Désormais, dès que nos amis s’intéresseront à Pomme, je me mettrai à parler de la Société des Nations ou du Péril Jaune. Du moins, nous sera-t-il permis, quand nous serons seuls, tête à tête, et porte close, de dire que notre Pomme, notre petit Nous-Deux est une merveille et un amour ?

Blanche entoura tendrement le cou de son mari :

— Un amour ? Ce n’est pas assez dire. Notre petit, c’est tout l’amour !… Et sais-tu pourquoi Pomme est un objet ravissant, une petite merveille, un espoir à nous faire éclater le cœur ? Dis, sais-tu pourquoi ?

— Bien sûr : c’est parce qu’il est ton enfant.

— Non ; c’est parce que j’ai bien aimé son père.